Le Manifeste - N° 6 - Mai 2004

 

Éditorial

Un moment de la lutte

Il faut une autre Europe, une Europe sociale, entend-on dire un peu partout à gauche et dans les milieux progressistes, une Europe ouverte, accueillante, humaine… Il faut avoir la lucidité de dire que ces slogans ont tout du vœu pieu.
L’Europe que vit notre peuple, c’est une agression permanente et insidieuse contre tout ce qu’il a construit et conquis au fil de son histoire. L’Europe aujourd’hui est devenue un super état qui ne dit pas encore son nom mais qui en a dores et déjà la fonction de base : pérenniser la domination du capital. Il faut avoir le courage de dire non et d’appeler à lutter contre cette infernale machinerie supranationale.
Les nations sont l’un des meilleurs et des plus solides points d’appui pour mener ce combat, avec les classes ouvrières et les peuples des pays concernés. Certes les états nationaux ont joué en leur temps le rôle qu’entend jouer l’Europe aujourd’hui. Mais la plupart de ces états, à la différence de l’Europe, ont été forgés par des révolutions et ont été marqués par des mouvements de libération nationale. Au fil des décennies, d’innombrables luttes menées dans le creuset des identités nationales ont profondément modifié la donne – matière à réflexion pour les communistes qui se prononcent pour le dépérissement de l’Etat en tant qu’instrument de domination de classe.
Il est singulier de voir qu’au moment historique où les nations ont acquis un réel début de maturité et où, donc, il devient possible de construire un réel internationalisme – échanges et coopérations équitables entre des nations souveraines – le capitalisme s’échine à construire de nouveaux outils de domination : un super état européen, ici, des instances similaires, ailleurs dans le monde. Que cet état soit fédéral ou confédéral apparaît au regard de ces enjeux bien secondaire.
Les élections européennes approchent. Beaucoup prédisent ou espèrent une réédition des élections régionales récentes. Mais attention ! Le bulletin de vote indifférencié à gauche qui a pu servir pour gifler la droite n’aurait pas du tout le même effet cette fois. La droite et la social démocratie s’accordent sur une même conception de l’Europe. Il est fondamental de voir quelles forces refuseront les chimères et se positionneront résolument du côté de la lutte, en sachant que le vote est un moment dans ce processus de lutte.
 

Francis Combes, André Gerin, Freddy Huck