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Le Manifeste - N° 5 - Avril 2004
Parmalat, un scandale
mondial…et européen!
Gestion de fraude
Croulant sous les dettes, le géant italien de l’agro-alimentaire a été mis en faillite fin 2003…
Si le scandale Parmalat n’est pas un Enron à l’italienne, ce
n’en est pas moins une illustration du pourrissement financier du capital et des
liens étroits entretenus avec la pègre. À la différence du courtier californien,
Parmalat demeure une véritable entreprise de production. Efficaces et rentables,
ses usines exploitent plusieurs dizaines de milliers de travailleurs,
principalement en Italie du Nord. Implantées localement comme l’indique son nom,
ses activités s’inscrivent dans une logique multinationale. Telle est la règle
de la mondialisation impérialiste.
C’est vrai de la production. Parmalat importe l’essentiel de son lait. À l’heure
de la liquidation de la Pac, ses fournisseurs n’avaient pas vraiment besoin de
cela. L’accumulation des impayés a ainsi conduit un groupement laitier ariégeois
à la faillite.
À qui le tour ?
C’est vrai aussi sur le plan financier. Quand la presse
financière transfigure l’affaire Parmélie en faillite d’un capitalisme italien
« familial », elle se moque du monde. Ainsi, La Tribune du 30 Janvier
invite-t-elle les Italiens à se mettre à l’heure européenne et à se doter de
banques d’affaires. Un comble quand on mesure la dimension proprement
maastrichtienne de l’affaire.
Jusqu’à présent, les riches Italiens profitaient largement des services
bancaires de la discrète Suisse voisine. Pour Parmalat, c’était le Luxem-bourg
qui servait d’essoreuse aux millions d’euros que la famille Tanzi, non contente
de vivre grassement de la sueur ouvrière et de celle des éleveurs européens,
soustrayait au fisc italien ainsi qu’aux épargnants d’un peu partout dans le
monde.
Car les banques du Grand-Duché partagent le culte helvétique du secret et y
ajoutent les facilités offertes, hier par le Franc belge et aujourd’hui par
l’Euro. Un comble quand on sait que ce petit pays héberge aussi la Cour de
justice européenne. Celle-ci condamne les États qui ne privatisent pas assez
vite ou autorisent la chasse à la palombe. Dans le pâté de maison voisin, Tanzi
créait à tour de bras des sociétés fictives permettant d’évacuer l’argent vers
les îles caïmans. Il le faisait sous l’égide de la Chambre de commerce
italo-luxembourgeoise. Toutes les obligations de Parmalat, aujourd’hui parties
en fumée, étaient cotées à la bourse de Luxembourg.
Pour avoir garanti ces obligations avec des liquidités inexistantes, Parmalat
fait aujourd’hui l’objet d’une plainte aux États-Unis. Ce qui nous ramène à
l’affaire Enron. Le garant comptable de ce dernier, Arthur Andersen, n’a pas
survécu à la déconfiture de son client. D’après Le Monde du 23 Janvier,
l’affaire Parmalat mouille Kpmg, bien connu un peu partout. À qui le tour,
ensuite ? Décidément, le privé est incapable de contrôler ses propres frasques.
Quant à l’Union européenne, il faudra qu’elle explique ce que vaut sa signature.
Elle figure au bas de nombreuses résolutions internationales traitant du
blanchiment d’argent sale. Ces textes visent, en général, des paradis fiscaux
tropicaux. Quand il s’agit de l’Europe, on parle plus de liberté de mouvement
des capitaux. Comme le linge sale, l’argent se lave bien en famille. Nous
autres, citoyens, avons sans doute des comptes à demander !
Olivier Rubens