décrétons le salut commun

Le Manifeste - N° 4 - Mars 2004

 

Intégrisme et extrême droite même combat
Réinventer la République

La question de l’intégrisme islamique taraude la société depuis une bonne vingtaine d’années. Elle vient de prendre une dimension publique nouvelle, notamment à l’occasion de la présentation du projet de loi sur la laïcité. Derrière la question du foulard se profile celle des comportements : soumission brutale des jeunes filles à des mœurs d’un autre âge, prosélytisme obstiné en faveur de l’obscurantisme, embrigadement des plus vulnérables.

L’arrestation et la mise en examen, ces dernières semaines, à Vénissieux, d’un imam réputé pour son extrémisme et soupçonné d’activités criminelles, pose la question des liens entre les groupes intégristes, les mafias locales ou largement ramifiées et le terrorisme international. Il est clair, en tout cas, que le quartier ou sévissait cet imam est depuis longtemps le théâtre d’événements dont nul ne peut s’accommoder. Il est à souhaiter que la procédure judiciaire permette d’y voir plus clair et aboutisse à désigner les responsables des exactions que subit la population. Car paradoxalement, si les intégristes ont une réelle emprise dans certains quartiers, ils sont loin d’entraîner dans leur sillage la masse des habitants, singulièrement des jeunes Français musulmans ou issus de l’immigration.
Certains observateurs n’hésitent plus à faire le rapprochement entre l’islam radical et politique et l’extrême droite. De fait, l’un et l’autre manipulent les mêmes armes : agressivité, anathème, intimidation sur fond d’exploitation systématique des tares de notre société. De fait, l’un comme l’autre usent et abusent de la démagogie en direction des plus faibles, des plus pauvres. Bien loin de défendre ces derniers contre la domination des puissants, ils les enfoncent en aiguisant leurs frustrations et en détournant leurs colères vers de mauvaises cibles. Ils se renvoient leur racisme et leur haine, Le Pen au nom de la culture judéo-chrétienne, les intégristes au nom de l’islam.

Du pain
sur la planche

Cela étant, un nouveau terrain de lutte contre l’extrême droite apparaît. Le leader du Front national, qui se déclare volontiers attentif aux misères des enfants de l’immigration, ne peut se départir d’une posture frontalement hostile à l’islam au nom des préjugés chrétiens de son public. S’ouvre un champ immense à labourer avec les musulmans de France qui veulent vivre leur religion dans la dignité, le respect des institutions républicaines et de la laïcité. Il y a une pédagogie de la lutte contre les intégristes à développer en partant du combat contre Le Pen et réciproquement : les musulmans peuvent jouer un rôle majeur dans le combat contre l’intolérance et les idées fascisantes du FN.
Qui mieux que les communistes peut s’atteler à cette tâche ? Qui d’autre, même, que les communistes ? Les Français issus de l’immigration sont concentrés dans les quartiers populaires, là où les méfaits du capitalisme et de la politique de droite se font le plus cruellement sentir. Dans ces quartiers où l’État de droit a cédé la place à un État coup de poing, c’est toute la République qu’il faut réinventer. Drapeau tricolore et drapeau rouge en main, il y a du pain sur la planche.

Jean Miaille