debout les damnés de la terre |
Le Manifeste - N° 4 - Mars 2004
L'avenir de la France
à l'encan
Plus de 26 000 chercheurs et enseignants-chercheurs (sur 105
000 en 2000) et déjà 10 000 citoyens (ayant une adresse électronique) ont signé
la pétition
de défense de la recherche publique. La précision a son importance. C’est une
première en France. Fidèle à sa logique européo-libérale, le gouvernement
s’emploie à bouleverser de fond en comble l’organisation de la recherche. Le
projet de loi sur la recherche laisse envisager la liquidation du statut actuel
de chercheur.
Or, il est indispensable de garantir la sérénité et la durée nécessaires aux
chercheurs. Ces conditions sont les seules compatibles avec l’activité de
recherche et l’indépendance d’esprit nécessaires. Le rapport qualité/prix de la
recherche française a fait la preuve de son efficacité, même s’il convient
aujourd’hui d’actualiser une organisation que les chercheurs du monde entier
nous envient.
La France a besoin d’une recherche vigoureuse. C’est indispensable au
développement économique de notre pays, ainsi qu’à son rayonnement culturel. Les
pays qui ne maintiendront pas un outil de recherche d’excellence deviendront
rapidement incapables de former les jeunes générations de manière compétitive.
Ils entreront donc dans une dépendance économique difficilement réversible.
Fermeture
de la recherche
publique
Limiter la recherche à quelques axes dits prioritaires, c’est
entrer dans une logique de sous-développement.
En France, nous assistons à un abandon de la recherche publique par l’État. Le
gouvernement français est bel et bien en train de fermer le secteur de la
recherche publique. Les baisses de crédits ajoutées aux annulations de crédits
et au non-paiement des crédits votés (début décembre 2003, 50 % des crédits de
fonctionnements 2002 du CNRS ne lui avaient toujours pas été versés !). Alors
que la recherche, activité sur le long terme, a besoin de perspectives claires,
le gouvernement décide une réduction drastique du nombre de recrutements de
jeunes chercheurs. Coïncidant avec un départ massif des cadres de la recherche
française à la retraite, cet abandon fera que l’écart avec les autres pays
équivalents atteindra rapidement un point de non-retour, d’autant plus
rapidement que les jeunes scientifiques s’expatrieront, un mouvement déjà
largement amorcé.
Le gouvernement veut balayer tous les acquis issus de la Libération qui ont fait
la preuve de leur efficacité dans la présence scientifique de la France au plus
haut niveau international. Ces acquis seraient balayés et remplacés par
l’instauration d’une précarité généralisée pour les chercheurs et les
chercheuses. Par ailleurs, transformer les grands organismes de recherche en «
Agences de moyens », c’est livrer la recherche à des pressions financières
permanentes et à la tutelle des États-Unis sur les programmes scientifiques.
Pr. Ivan Lavallée
Enseignant-chercheur