la terre n’appartient qu’aux hommes |
Le Manifeste - N° 2 - Décembre 2003
Le capitalisme, c'est la guerre
C’est en véritable Union militariste des pétainistes que la
majorité de l’Assemblée s’est exprimée à l’occasion du débat sur le budget
militaire, le 4 novembre. Un député, certes UDF, a donné le ton en proclamant :
« Soyons fiers de nos militaires et donnons leur les moyens de continuer. » Le
ministre Alliot-Marie n’était pas en reste, qui veut « souligner le rôle que
joue le ministère de la Défense en matière de recrutement, de promotion et
d’insertion professionnelle. » On y voit « comment la société peut assurer cette
mobilité sociale dont nous avons tant besoin »… Pour la majorité, la caserne est
un idéal social. Quant au contrôle de l’ennemi intérieur, l’armée joue son rôle.
On apprend ainsi que la surveillance militaire du G8 à Évian a coûté plus de
17 millions de francs. Certains rêvent même d’une force européenne de
surveillance des aéroports et des gares. Avec des uniformes « verts de gris » ?
Comme l’a relevé un député socialiste, le budget de la défense augmente de deux
milliards tandis que l’état économise 300 millions sur l’ASS. Voilà qui résume
la politique de Raffarin.
C’est un budget de pays impérialiste. Chaque année, la France envoie davantage
de soldats dans les pays dominés. Plus de 15 000 y stationnent actuellement pour
la seule armée de terre. Toujours présente en Afrique, elle y protège ces grands
démocrates que sont Biya, Bongo et autres… Le plus important contingent est au
Kosovo, suivi de Djibouti. Sous drapeau européen, les troupes françaises sont
désormais présentes en Macédoine et en République démocratique du Congo. Elles
participent à l’occupation de l’Afghanistan.
Un budget de pays capitaliste
Il y a consensus sur le constat et sur les solutions. Pour un
député UMP, « le monde dans lequel vivront nos enfants est incertain », comme
s’il s’agissait d’une donnée fatale. Faut-il rappeler pourtant que le Pacte
atlantique est militairement et économiquement hégémonique ? Utilise-t-il depuis
dix ans cette situation pour des initiatives de paix ? Tous les groupes
acceptent l’arme nucléaire comme une nécessité. « L’autonomie de la défense
européenne est exclue sans le nucléaire » affirme ainsi Paul Quilès. Il en est
de même du PCF qui se contente de rappeler l’engagement pris « de ne pas
utiliser l’arme nucléaire contre les pays non-nucléaires ». Et contre les
autres ? Après avoir justement dénoncé la casse industrielle et les velléités de
privatisation de la Direction des constructions navales, Jacques Brunhes veut
« aller vers une défense européenne autonome, tournant le dos au modèle
américain de puissance et de domination ». Chacun ses ambitions et ses
illusions.
Cette Europe de la défense se construit sans consultation populaire sur la base
d’une décision de principe prise en 1999 à Helsinki. Elle s’est déjà traduite
par deux interventions attentatoires à la souveraineté des peuples. Coutumiers
du fait accompli, les maastrichtiens veulent inscrire ces structures militaires
dans le projet de constitution. Ils l’ont décidé en juin dernier, lors du sommet
de Salonique. Une raison de plus pour rejeter ce projet de constitution.
Certains députés de droite vont même jusqu’à proposer de dispenser ces dépenses,
voire tout le budget militaire, du respect des fameux 3 % de Maastricht…
un état-major commun
C’est malheureusement moins l’opposition populaire que les
contradictions inter-impérialistes qui ralentissent ce processus. France,
Allemagne et Grande-Bretagne ont décidé le principe d’un état-major commun. Une
décision surréelle alors que les deux premiers refusent tout engagement en Irak
où les derniers nommés sont englués. Le lien étroit entre Londres et Washington
n’est un secret pour personne. Une union militaire est dans ces conditions
d’autant plus problématique que, si l’Allemagne domine économiquement l’Europe,
la France et la Grande Bretagne cumulent à elles deux 80 % des dépenses
militaires.
Dans ces conditions, il est non seulement scandaleux que l’état entende
sacrifier les capacités industrielles du GIAT, mais c’est en plus incohérent. Le
gouvernement et sa majorité veulent se passer du groupe français. Le projet
consisterait à restructurer l’industrie de l’armement autour de trois groupes
transnationaux : le franco-allemand EADS (Lagardère), le français Thalès et… le
britannique BAE Systems… Une perspective virtuelle tant que Londres fait bande à
part.
Le fait que Michèle Alliot Marie puisse déclarer, à propos du GIAT que « les
experts choisis par les syndicats admettent qu’il faut supprimer 3 à 4 000
emplois » n’en est que plus regrettable.
O. R.